Une nuit pour un an

Short stories


Quand surgit le printemps

Quand surgit le printemps, j’ai deux affaires ΰ mettre en ordre. D’abord, m’occuper des jeunes pousses des arbres, du mϋrier en particulier, et ensuite soigner les branches et les fleurs de l’arbre de Judιe. Le mϋrier m’intιresse, car il procure une ombre ιpaisse et lιgθre en ιtι, il fait de beaux fruits qu’apprιcient les hommes et les bκtes. Mais l’arbre de Judιe m’intιresse plus que tout autre, car il est mon point de rencontre avec Judas. Je m’emploie toute l’annιe ΰ ce qu’il soit, au moment adιquat, aussi fleur que possible et que ses branches soient solides, lisses et pleines de vie, prκtes supporter le poids et les convulsions du corps repenti. Aprθs avoir achevι les diverses tβches, autrement dit, sarclage aux racines, nettoyage et ιlagage des rameaux morts, chaulage du tronc et dιfrichage du sentier qui mθne l’arbre, je m’assois et je l’attends en tressant la corde. Je veille jour et nuit et j’attends jusqu’au Jeudi saint, que Judas apparaisse. Chaque fois, je l’entends de loin, qui approche en haletant. Il enrage, il se lamente et maudit. J’entends des sanglots et des gιmissements, tandis qu’il se dιchire dans les ronces et les herbes sauvages. Je perηois l’odeur de sang de ses pieds ιcorchιs, son souffle court et ses gouttes de sueur. « Il vient », dis-je, « cette annιe encore, il a prιfιrι mon arbre ». Dθs qu’il arrive, en piteux ιtat, il se tient quelques instants debout devant moi et il me dιsigne la branche ΰ laquelle il dιsire se pendre. Je lui tends le noeud coulant, il l’attache ΰ son cou, tourne son regard vers le ciel, bredouille quelque chose et se lance dans le vide. Son corps suspendu tressaute et peu peu se laisse aller ΰ une immobilitι complθte. Alors je ramθne la corde, je dιfais le noeud coulant et je dιpose le corps meurtri au pied de l’arbre. Trois jours durant, je le pleure avec des chants funθbres. Puis, je me sιpare de lui. Rιconciliι avec les remords et la culpabilitι, vκtu d’une belle chemise de lin blanc et tenant un cierge tout blanc, je parcours les petites ιglises, le soir de la Rιsurrection. Mκme si j’aimerais bien, je ne porte pas de cravate, je ne peux pas. La marque noire autour de mon cou m’en empκche. Translation: Isabel Tloupas


Yannis Paschos reads the short story “As Spring Appears”:  https://www.youtube.com/watch?v=_KMAO5ojCxA

Paschos writes about his past almost as if he were praying. This short story is psychotherapeutic not so much for its events as for the sheer sense of interiority achieved by the author. Kostis Papagiorgis, Athinorama, 2009

A collection of short stories by a penetrating and sensitive writer who through the elasson talks about the great. Kathimerini, N. Vatopoulos, 2009

The stories in “One Night in a Year” are short, even the ones that end up in meteors stay with you, leave you with a taste and come back to your mind at an unsuspected interval.Thymios Tzallas, Ipirotikos Agon 2009